Quelques pistes pour exploiter un enregistreur d’écran en cours de langues

Dans cette situation de crise qui nous contraint à faire des cours à distance, l’impression d’anonymat domine souvent, laissant émerger un sentiment de frustration face à la dimension impersonnelle de ce nouveau type de relation.  Comment insuffler une petite touche personnelle aux documents et fichiers que nous envoyons à nos apprenant.es ? Comment redonner un peu de personnalisation à nos cours ? Certes, les visioconférences, les échanges sur le réseau social choisi par le groupe permettent d’échanger, de retrouver un peu l’humour, les blagues, les manies de chacun et de chacune auxquels nous étions habitués en présentiel. Toutefois cette coloration personnelle s’estompe sous l’anonymat des fichiers, des documents scannés, des exercices corrigés en pdf,  etc.
Comment personnaliser nos cours, et plus particulièrement pour les cours de langues, comment conserver la continuité vocale, voire visuelle avec nos apprenant.es ?
L’enregistreur d’écran, s’il n’est pas un miracle, peut compléter nos stratégies et redonner un saupoudrage de dimension personnelle aux activités proposées. Dans le modèle SAMR de Puentedura, il ne s’agit pas vraiment de « transformation » de la tâche : on reste dans l’ « augmentation », dans l’amélioration fonctionnelle, qui n’en reste pas moins intéressante dans le sens où elle teinte d’une couleur plus personnelle les documents que l’on envoie. A condition que l’on crée soi-même ses vidéos pour ses apprenant.es … D’où une envie de partager avec vous des outils faciles d’utilisation qui vous permettront de créer sur mesure des vidéos adaptées aux besoins de vos groupes.

Quel enregistreur d’écran choisir ?

Un enregistreur d’écran permet d’ajouter de la voix, de commenter, d’expliquer un document, un diaporama, une iconographie, une production écrite, etc. que vous avez sur votre ordinateur : il est ainsi possible de créer facilement des vidéos personnalisées et de les partager avec nos apprenant.es sous forme de lien pour stimuler le travail à distance en autonomie. Il existe de nombreux enregistreurs d’écran gratuits. Un des plus faciles à utiliser me semble être ScreencasOmatic, dont les fonctionnalités proposées dans la version gratuites sont largement suffisantes.
Voici un tutoriel pour se lancer dans la création de vidéos avec cet outil : j’y explique aussi comment corriger l’enregistrement audio.

Tutoriel pour créer des vidéos avec ScreencastOmatic

Il existe bien d’autres outils pour faire des vidéos : en voici un autre, très intéressant, dans le sens où il permet de créer des vidéos rapides qui n’exigent pas un montage complexe, idéal pour des capsules « flash ». Il s’agit de LOOM, que l’on ne peut utiliser qu’avec le navigateur Google Chrome et qui se présente comme une extension que vous aurez en permanence sur votre navigateur. Voici un petit tutoriel pour l’installer.

Tutoriel pour installer l’extension Loom sur le navigateur Google Chrome

Un tout nouvel enregistreur d’écran Panopto permet d’enregistrer son écran de manière encore plus simple, sans avoir à télécharger de logiciel, ni même à créer de compte. Toutefois, les fonctionnalités sont très limitées et l’on ne peut enregistrer l’écran que d’un seul tenant, sans avoir la possibilité de faire une pause, ni de corriger par conséquent un morceau de l’enregistrement.

En quoi un enregistreur d’écran peut-il enrichir les cours de langues à distance ?

Varier les consignes écrites : donner des consignes sous forme de vidéos

Il est tout d’abord possible de donner des consignes, d’annoncer le programme des cours ou d’un cours, non pas sous forme de mails comme on le fait souvent mais sous forme de vidéos, l’idée étant de ne pas passer trop de temps à préparer sa vidéo. Pour les apprenant.es, c’est une compréhension orale supplémentaire qu’il est possible d’écouter plusieurs fois si la consigne n’est pas comprise. De plus, le fait de voir et d’entendre son enseignant.e octroie une touche bien plus humaine et personnalisée au message transmis qu’un mail.
Voici un exemple destiné à mon groupe de « Débutants » : la vidéo est faite avec ScreencastOmatic et a été créée très rapidement puisqu’il y a un plan statique, sans changement de fond d’écran.

Accompagner la prononciation à distance
L’enregistreur d’écran permet aussi de proposer une aide pour prononcer correctement des mots, des phrases. Il suffit de partir d’un document écrit, d’une infographie ou d’une iconographie présentant une thématique, par exemple « les fruits » (A1) proposé ci-dessous, puis d’y ajouter non seulement sa voix, mais aussi des mises en garde, des conseils, des écueils à éviter : faire attention aux liaisons avec l’article, aux pièges de la graphie, insister sur les difficultés rencontrées particulièrement par son public, etc. Les avantages de telles vidéos sont encore fort appréciés des étudiant.es qui peuvent s’entraîner à prononcer loin du regard et de l’oreille du groupe, (chacun.e, surtout les plus timides, protégeant ainsi sa « face ») et qui reconnaissent la voix de l’enseignant.e. : il s’agit d’un document fait sur mesure, à leur attention, avec l’intonation habituelle qu’ils entendent en classe. Une manière de prolonger virtuellement le contact et le lien.
Voici un exemple qui mélange apprentissage du lexique et prononciation sur les fruits, fait avec LOOM.

Et en voici un autre avec la prononciation des verbes irréguliers au subjonctif.

Enrichir et compléter le lexique

Il est aussi possible d’enrichir le lexique à distance en complétant un réseau lexical qui a commencé à être étudié en cours : la capsule vient structurer le groupe de nouveaux mots et en ajoute d’autres dans un second temps.

Exemple de capsule faite avec Loom pour synthétiser le lexique du tourisme et l’enrichir (B2)

Corriger des productions écrites

Face à la difficulté de corriger les productions écrites qui arrivent dans notre boîte mail sous tous les formats possibles, il est possible de trouver une autre fonctionnalité aux enregistreurs d’écran : corriger une copie en la commentant avec sa voix, en ajoutant des explications qui seraient trop longues à écrire, et pourquoi pas, si l’étudiant.e est d’accord pour partager sa production écrite avec les autres, transformer une correction en modèle à suivre ou pas pour apprendre à respecter une méthodologie.
Voici un exemple de correction faite sous forme de vidéo avec ScreencastOmatic : à partir de la lettre écrite par une étudiante (vers A2), j’ai fait une vidéo qui commente les points forts et les points faibles de la production et qui rappelle aussi la méthodologie pour écrire un mail/ une lettre tout en insistant sur les problèmes de langue importants.

Exemple de production écrite corrigée sous forme de vidéo avec ScreencastOmatic

Corriger un exercice structural
Plutôt que de donner un corrigé écrit qui n’inclut pas nécessairement les explications, on peut de temps en temps créer une vidéo dans laquelle on explique et justifie les bonnes réponses de manière à accompagner à distance la correction de l’exercice et à lui donner plus de « chair » dans les explications, comme dans l’exemple ci-dessous. Il s’agit de la correction d’un exercice structural sur le discours indirect au passé, fait avec LOOM.

Exemple d’exercice structural corrigé sous forme de vidéohttps://www.loom.com/share/6ee51cc4c0724c6490d0821f7c42dbfa

Faire une capsule sur un point de langue
C’est le principe de la classe inversée de niveau 1 (Marcel Lebrun) : le cours de langue est donné sous forme de capsule et envoyé par mail aux apprenant.es qui la regardent une ou plusieurs fois, en faisant des pauses si nécessaire et en complétant une feuille de route de manière à qu’une trace écrite demeure. Ensuite, en présentiel, ou en visioconférence si le présentiel n’est pas possible, on met en commun les questions, on demande aux étudiant.es de donner des exemples pour commencer à réinvestir le point de langue abordé.
Dans ces cas-là, les fonctionnalités de Loom sont un peu simples et il vaudrait mieux privilégier ScreencastOmatic. Voici un exemple proposé par l’une de mes étudiantes de M2 FLE, Léa Ithurria, qui a créé une capsule sur les partitifs avec ScreencastOmatic et la propose en libre accès sur le site Le TrèFLE fait des capsules.

Exemple de capsule faite avec ScreencastOmatic par Léa Ithurria

Faire faire des vidéos à ses apprenant.es avec un enregistreur d’écran

Pour boucler la boucle, il est intéressant de faire faire des vidéos, des exposés, des présentations par nos étudiant.es, comme dans l’exemple ci-dessus de manière à ce qu’à leur tour, ils puissent partager avec d’autres leur production. Tout dépend bien sûr des étudiant.es et de leurs capabilités numériques.

Il est clair que l’outil en soi ne transforme rien : tout repose sur la scénarisation du cours et sur l’intégration judicieuse de la capsule que vous aurez créée dans l’économie de la séquence. De plus, il est également fondamental de faire varier les supports d’activités, d’alterner envoi de fichiers, de capsules, de quiz en ligne, de productions écrites collaboratives afin de conserver à distance la diversité d’activités que nous avions en classe. Enfin, si l’on veut créer cette continuité vocale avec ses apprenant.es, il est fondamental de créer ses propres enregistrements d’écran.
Ces pistes sont bien sûr à compléter avec les idées que vous voudrez bien partager !

#A1 Le lexique de la ville : Paris, clichés et anti-clichés

Il est toujours difficile de travailler en A1 avec des documents authentiques. En voici deux que l’on peut facilement utiliser pour travailler la description de son environnement, tout en faisant un point culture sur Paris.

Vous connaissez peut-être cette première vidéo : en 2016, la Mairie de Paris a fait tourner une vidéo pour promouvoir la ville. Si ce clip plaît énormément aux apprenant.es, il n’en demeure pas moins une jolie concentration de clichés et ne présente que des facettes très particulières de la capitale.

Capture d’écran 2019-02-06 à 10.34.00
Capture d’écran du clip « Paris » (Mairie de Paris)

D’où la réaction très rapide de certains autochtones qui ont publié une réponse sous forme de vidéo : « Paris, on t’aime aussi » dans laquelle est mise en avant la diversité culturelle, ethnique et sociale de Paris.

Capture d’écran 2019-02-06 à 10.39.32
Capture d’écran de la vidéo « Paris, on t’aime aussi »

Il est possible d’utiliser ces deux vidéos à tous les niveaux pour travailler sur les représentations de Paris avec les apprenant.es, notamment avec le niveau A1 … étant donné qu’il n’y a pas de paroles. C’est l’occasion de travailler la description de l’environnement, de la ville pour aller vers la description de sa ville.

Voici le descriptif d’une partie de la séquence que j’ai faite avec mes apprenant.es et qui intègre des outils numériques pour faciliter l’apprentissage du lexique :

  • (En amont, travail sur les prépositions devant villes et pays)
  • Remue-méninge sur Paris avec écriture des mots au tableau
  • Visionnage de la vidéo officielle : quelles impressions ? Qu’est-ce qu’il y a ?
  • Distribution d’une feuille contenant une liste de mots liés à la ville, qui apparaissent (ou pas) selon le déroulé chronologique de la vidéo. Les mots sont expliqués par certain.es apprenant.es ou par l’enseignant.e et un espace sur la feuille permet de dessiner l’élément ou de l’écrire dans sa langue
  • 2eme visionnage : les apprenant.es cochent les éléments vus
  • Proposition d’exercices de systématisation faits avec LearningApps pour renforcer l’appropriation de mots importants (fleuve, pont, musée, marché, place, escaliers, château…) à distance
    • un premier exercice d’association image/mot

      Capture d’écran 2019-02-06 à 10.56.22

    • un second exercice de regroupement pour travailler le genre des noms : féminin ou masculin ?

      Capture d’écran 2019-02-06 à 10.53.56

  • En classe, visionnage de la vidéo « Paris on t’aime aussi » : quelles sont les impressions ? Les différences ? Les apprenant.es réinvestissent le lexique appris et on complète avec de nouveaux éléments.
  • Tâche finale : faire une présentation de sa ville à partir de 5 photos au minimum à l’oral pour les autres apprenant.es du groupe.
    • Production écrite en classe : « Dans ma ville, il y un fleuve. Il s’appelle …. Il y a aussi un musée… »
    • Présentation orale individuelle en s’appuyant sur le diaporama de sa ville
  • Pour aller plus loin ? Faire créer une vidéo à chaque apprenant.e avec Spark Video pour présenter sa ville tout en enregistrant sa voix. A venir…

Les liens utiles :

Beekast, un outil intéressant pour renouveler le remue-méninges et le travail collaboratif

Beekast, outil découvert et testé à Ludovia14, est un site qui permet de rendre ses apprenants actifs dans le sens où ils peuvent écrire et participer individuellement ou en groupes, aux « activités » proposées, via un smartphone, une tablette ou un ordinateur,

  • en présentiel pour dynamiser le cours : les participants répondent aux questions, écrivent en direct et le résultat peut être diffusé en direct ou projeté à la fin pour créer un effet de surprise ;
  • et pourquoi pas, à distance, ce qui permet de laisser le temps à chaque apprenant de peser les mots choisis, de rechercher un concept oublié. On découvre le résultat ensemble en présentiel.

Il suffit pour les participants d’aller sur le site de Beekast et de taper un code très simple donné par l’enseignant. Le point fort de ce site est la simplicité de son utilisation.

Capture d_écran 2017-09-14 à 10.13.25

ATTENTİON, DEPUİS LA PUBLİCATİON DE CET ARTİCLE, BEEKAST EST MALHEUREUSEMENT DEVENU PAYANT. EN VERSİON GRATUİTE, SEULES 3 PERSONNES PEUVENT SE CONNECTER A UNE SESSİON.

Voici quelques pistes d’exploitation pédagogique en Fle, en littérature et en UE Tice en Master Fle :

  1. Renouveler le remue-méninges : ce site permet, entre autres, de renouveler l’étape du remue-méninges au début d’un cours en créant un nuage de mots collaboratif en temps réel. Le nuage peut être projeté en direct ou montré seulement à la fin de l’activité.

Capture d_écran 2017-09-10 à 11.42.26
Exemple de nuage de mots en UE Tice (côté enseignant)

Capture d_écran 2017-09-10 à 18.44.45
Exemple de nuage de mots en UE Tice (côté enseignant)

L’activité peut servir à caractériser les représentations des apprenants sur un sujet, comme dans l’exemple ci-dessous où j’ai demandé à mes étudiants des adjectifs pour caractériser leurs représentations des outils numériques en amont du cours.

Capture d_écran 2017-09-13 à 18.59.20
Exemple de nuage de mots en UE Tice (côté étudiants)

En cours de langues, le nuage permet de montrer tout le lexique déjà connu sur un thème précis par exemple.

En littérature, il peut servir à mettre en évidence les mots-clés déjà connus sur un mouvement ou une époque.

Capture d_écran 2017-09-18 à 16.57.47
Exemple de nuage de mots en littérature (côté apprenants)

Une limite toutefois : au fur et à mesure que les apprenants écrivent les mots, une liste de mots suggérés apparaît, qui peut influencer les choix de chacun.

2) Faire une liste d’idées à partir d’un sujet dans des catégories pré-définies : Une autre activité intéressante est le « brainstorming » qui invite les participants à écrire non plus un seul mot comme dans le nuage de mots, mais une courte phrase (140 caractères maximum) sur un thème que l’on peut diviser au préalable en catégories pour guider la réflexion, comme une préparation de carte mentale.

Capture d_écran 2017-09-10 à 11.52.27
Activité « Brainstorming » côté enseignant

Voici, ci-dessous, un exemple de tableau rempli par les apprenants, individuellement ou en groupes : il est ainsi possible de repérer les idées similaires dans une catégorie, de les mettre en avant en les « likant » anonymement. C’est un excellent support pour faire réagir apprenants ou étudiants en les invitant à commenter les idées des autres, d’autant plus que ces idées sont données anonymement : la « face » de chacun est ainsi protégée.

Capture d_écran 2017-09-10 à 11.58.50

« Brainstorming » peut être aussi utilisé comme un nuage de mots structuré en catégories comme dans l’exemple ci-dessous où les apprenants n’écrivent que des mots, des concepts.

Capture d_écran 2017-09-13 à 19.18.36

Il est aussi possible d’utiliser ce tableau pour proposer aux élèves de rechercher des idées dans le cadre d’une argumentation avec une structure préétablie et en demandant aux groupes de chercher des arguments ou des exemples.

3) Une autre piste intéressante suggérée par mes étudiants est d’utiliser « Brainstorming » comme support pour une évaluation formative « flash » et collective : on crée les sous-catégories et on demande aux apprenants de compléter chaque catégorie avec les idées dont ils se souviennent pour chacune d’elles afin de voir ce qu’ils ont retenu. Il faut toutefois savoir qu’au fur et à mesure que chaque apprenant écrit une idée, il peut voir ce que les autres ont écrit.

4) Plus classique, l’activité « Formulaire », dont les réponses ne sont visibles que par l’enseignant, permet de préparer un questionnaire très facilement avec, au choix, des QCM ou des questions ouvertes.

Capture d_écran 2017-09-13 à 19.26.08
Ex de « Formulaire » avec les 2 types de questions (côté enseignant)

Capture d_écran 2017-09-13 à 19.28.41

Capture d_écran 2017-09-13 à 19.36.07
Ex de présentation des résultats du « formulaire »

 

 

 

 

 

 

On peut donc l’utiliser pour pour récolter des données plus personnelles, pour sonder les apprenants dans le cadre d’un projet, pour faire un questionnaire d’évaluation du cours, pour un questionnaire en évaluation formative, etc.

Beekast propose aussi les activités « Vote » et « Quiz », ainsi que « Mur de Selfies » qui m’a paru un peu gadget dans le sens où chaque apprenant se prend en photo et poste celle-ci sur le mur, mais sans pouvoir ajouter son prénom.

Capture d_écran 2017-09-14 à 10.58.15
Les 6 activités proposées par Beekast

Enfin, outre les activités, un mur virtuel collaboratif est à la disposition du groupe pour ajouter des commentaires ou des photos et favorise l’interaction entre les apprenants. Un des avantages est que l’on peut y déposer des documents au format photo auxquels les participants auront un accès facile. On peut aussi modérer, voire effacer les commentaires…

Capture d_écran 2017-09-14 à 11.07.03
Exemple de mur collaboratif

Voici un Tutoriel pour commencer à utiliser Beekast

 

Apprendre le français avec les séries TV : « Flequés », parodie de « Bloqués »

Voici un retour d’expérience de mon cours « Apprendre le français avec les séries TV ». Grâce à mon stagiaire de M1 de Fle, Quentin, j’ai découvert la série « Bloqués », diffusée initialement sur Canal+ qui met en scène deux jeunes avachis sur un canapé qui ne font rien et parlent de leur vie, en rêvant à une vie meilleure.

Les épisodes se caractérisent sur le plan linguistique par un langage familier, de nombreux mots en verlan et sur le plan culturel, par des références assez difficiles à comprendre sur l’actualité (sportifs, chanteurs, mais aussi « Gros Quick », etc.). C’est pourtant, malgré cette difficulté, une excellente source pour approfondir l’enrichissement du registre familier des apprenants, pour les sensibiliser au verlan hyper-actuel et leur permettre de comprendre quelques conversations de la vie réelle…

capture-decran-2016-12-09-a-09-43-06
Capture d’écran de la série « Bloqués »

En outre, le format, très court de moins de 2 minutes, l’austérité du décor (un huis clos dans un appartement désordonné, un canapé) et le nombre réduit d’acteurs (deux) sont autant d’éléments qui permettent d’envisager une parodie avec des apprenants.

Un autre grand intérêt des épisodes de cette série repose sur le fait que les dialogues sont souvent constitués de répliques données en alternance et proposant des définitions personnelles d’un concept, d’une idée. Par exemple, « L’enfer, c’est … », « La vie serait plus cool si … ». La structure anaphorique permet de donner un cadre aux apprenants lors de la compréhension mais aussi au moment de la production écrite.

Objectifs :

  • enrichir le « parler jeune » des apprenants : lexique, syntaxe, prononciation
  • travailler sur les différents niveaux de langue
  • être capable de produire un texte en « parler jeune » avec un contexte adéquat
  • parodier la série TV » Bloqués » et produire un épisode en groupes.

Déroulement de la séquence :

  • visionnage de plusieurs épisodes de « Bloqués » sans, puis avec une transcription lacunaire. Les apprenants ont fait un relevé du « parler jeune » (verlan, mots familiers, intonation, etc.)
  • mise en place d’une enquête : par groupe, les étudiants sont partis enquêter sur le terrain, à l’université ou dans leur environnement afin de récolter un certain nombre de mots ou d’expressions employés par les jeunes. Ils devaient accompagner chaque mot d’un exemple et définir le registre. Ils ont rempli un document collaboratif sur Google Drive pour mettre en commun tous ces mots et éviter les doublons.
  • analyse et réinvestissement du lexique récolté : nous avons expliqué les mots, trouvé des équivalents en langage courant, proposé d’autres exemples pour bien cerner le contexte dans lequel il est possible de réutiliser ces mots et pour en combiner deux ou trois.
  • présentation du projet d’écrire une parodie de « Bloqués »

capture-decran-2016-12-09-a-10-03-22

  • productions écrites : les apprenants devaient choisir ou proposer un titre d’épisode (« l’enfer, c’est », « j’ai largué mon mec parce que… », « la vie serait plus cool si.. ») et écrire individuellement 4 ou 5 phrases donnant une proposition et contenant du lexique familier
  • tournage de nos épisodes : nous avons tourné en cours en une heure avec une tablette. Le seul apprenant qui a refusé d’être filmé s’est chargé de jouer le rôle du réalisateur. Il n’y a pas eu de répétitions par manque de temps mais aussi car l’idée n’était pas d’avoir des vidéos parfaites. L’objectif essentiel était de réinvestir ces mots dans une situation liée au plaisir d’apprendre. J’ai ensuite fait les montages avec Imovie.
  • publication de nos épisodes : dès le lancement du projet, il a été annoncé que les productions seraient publiées sur la page Facebook de notre institut, ce qui fonctionne désormais comme un levier pour la motivation et comme une habitude car toutes nos parodies ont été partagées auparavant. Cette phase est essentielle dans le sens où elle permet un partage de la production avec le réseau d’amis (même les non-francophones !) et où elle donne du sens à la parodie qui sera regardée par d’autres personnes que le groupe d’étudiants de la classe.

capture-decran-2016-12-09-a-09-36-46

En conclusion, si l’on compare cette série aux autres séries travaillées précédemment (« Mère et fille », « Bref », « Parents mode d’emploi »), elle est plus difficile sur le plan de la compréhension car elle met en contact les apprenants avec un « parler jeune » auquel ils ne sont pas habitués et qu’ils ne découvrent que sporadiquement dans les cours de langue : avec cette série, la dose de « parler jeune » est à la limite du supportable pour certains. Il est donc fondamental de travailler en amont sur les stratégies à mettre en place pour la compréhension.

capture-decran-2016-12-09-a-09-38-02

Elle est aussi plus difficile car elle met en contact les apprenants avec le lexique familier, et par conséquent avec, parfois, sinon des concepts plus vulgaires, du moins des sujets plus tabous, ce qui est toujours un exercice d’équilibriste pour l’enseignant avec certains apprenants dont la culture est très pudique. Il faut accepter de sortir de sa zone de confort.

Au terme de ce semestre, la série que mes apprenants placent en haut du podium est « Bref » : même si le débit est très très rapide, l’humour les a séduit, le fait que le personnage soit un anti-héros aussi. Elle est plus facile à comprendre car il y a moins d’allusions culturelles très actuelles que dans « Bloqués ». Mais, la force de cette dernière série est qu’elle a offert aux apprenants un rapport jubilatoire, un peu rabelaisien à une langue qu’ils ne connaissaient presque pas…

capture-decran-2016-12-09-a-09-41-05

Apprendre le français avec les séries TV (3)

Utiliser les séries TV est non seulement un excellent moyen pour apprendre du lexique actuel, des structures grammaticales et avoir un contact vivant et actuel avec la culture française, mais c’est aussi l’occasion d’inviter les apprenants à créer en imitant ou parodiant les épisodes vus. C’est donc une belle occasion de réinvestir ce qui a été appris et de stimuler la créativité des apprenants dans le cadre rassurant de l’imitation ou de la parodie.

Par exemple pour la série « Bref », après avoir vu plusieurs épisodes, nous avons analysé ensemble

  • le style particulier des phrases très courtes, juxtaposées, sans autre coordination que « alors » ; l’emploi du passé composé ; le fait que presque toutes les phrases commencent par « je »; le décalage entre ce que pense le personnage et ce qu’il dit ; le lexique familier, la structure récurrente « Voix off du narrateur annonçant ce qui va être dit/ Paroles d’un personnage répétant ce qui a été annoncé par la voix off », etc.
  • le caractère du personnage (paresseux, menteur, …), la construction de chaque épisode (les obstacles au désir, la chute, le rythme, …), l’importance de la musique, les « bips » pour masquer les gros mots…

Par groupes de 2 ou 3, les apprenants ont écrit un scénario en tenant compte de toutes ces remarques afin de proposer un nouvel épisode à la manière de « Bref ». La contrainte était de produire une vidéo et de se filmer.

Voici quelques épisodes produits par mes étudiants :

 Cette expérience a été très positive, c’est pourquoi je me permets de la partager sur ce blog. Sur le plan technique, tous ont travaillé en autonomie, en utilisant les moyens qu’ils voulaient : je ne suis absolument pas intervenue sur ce plan-là, la réalisation technique ne peut être un obstacle pour ceux qui voudraient inciter leurs apprenants à faire des vidéos. Sur le plan des acquisitions linguistiques, le réinvestissement est notoire et d’autant plus efficace qu’il a été fait avec plaisir et enthousiasme. Enfin, le fait de montrer, de partager les créations a à la fois engendré une certaine pression, voire de l’émulation, et a aussi fortement contribué à souder le groupe en valorisant l’investissement de chacun.

Bref : apprendre le français avec les séries TV ne peut se limiter à la seule étude des séries. La partie créative est tout aussi importante que le temps du visionnage et de l’analyse…

Apprendre le français avec les séries TV (2) : « Bref »

Une autre ressource possible pour apprendre le français avec les séries est la série TV française « Bref », qui se caractérise par un format très court (2 minutes environ) et est un formidable outil pour travailler la compréhension orale avec un débit TRES rapide, même pour les natifs… Les apprenants l’aiment beaucoup car elle reflète la réalité de la vie d’un célibataire parisien qui n’a rien d’un champion : il est paresseux et passe son temps à essayer de draguer les filles. Les problématiques, le rythme comme le vocabulaire sont très actuels et invitent parfois à un certain bovarysme… loin des héros habituels, ce qui engendre des rires, même lors de la première écoute car les images aident à comprendre.

Capture d’écran 2016-02-26 à 11.03.39
Capture d’écran d’un épisode de « Bref »

Par contre, contrairement à la série « Mère et fille » qui est tout public, « Bref » convient davantage à un public un peu plus âgé, du moins en ce qui concerne certains épisodes.

Voici trois épisodes qui nous ont servi de supports pour travailler :

Pour varier l’exploitation pédagogique de ce dernier épisode, plutôt que d faire une première reconstitution collective de ce qui a été compris, j’ai choisi de faire un quiz en ligne en direct, immédiatement après le premier visionnage avec Socrative.com. J’ai donc créé un quiz d’une dizaine de questions soit très faciles, soit un peu plus exigeantes : les réponses qui s’affichent en direct ont certes un côté gadget, mais elles ont le mérite de refléter la qualité de la compréhension et de dédramatiser les erreurs, tout en soudant le groupe classe grâce à l’interaction. Voici quelques questions :

Ce diaporama nécessite JavaScript.

Capture d’écran 2016-03-03 à 17.09.50
Résultat du quiz

Apprendre le français avec les séries TV (1) : « Mère et fille »

Voici un cours de renforcement en FLE que je propose ce semestre à des étudiants de niveau A2/B1 : apprendre le français avec des séries TV. Je partage cette pratique car le retour que j’en ai chaque semaine est très positif. Il s’agit de proposer une approche de l’enseignement du français, différente, plus ludique et proche de la réalité de la vie quotidienne française.

Pourquoi la série « Mère et fille »?

Capture d’écran 2016-02-04 à 14.41.49
Capture d’écran de la série « Mère et fille »

J’ai choisi de m’appuyer sur la série TV « Mère et fille » qui existe depuis 2012 sur la chaîne Youtube de Disney Channel FR et qui met en scène une adolescente de 14 ans, Barbara et sa mère, Isabelle, 39 ans, divorcée : cette série, destinée à un public plutôt jeune, a le mérite d’éviter des scènes trop légères ou violentes qui pourraient déranger dans un contexte scolaire ou au vu de certaines cultures des apprenants. C’est surtout une comédie, qui fait vraiment rire, tant les apprenants que leur enseignante, incitant donc à apprendre le français avec plaisir. Enfin, le format court (soit un épisode de 5 minutes, soit un épisode composé de 3/4 sketchs) épargne les efforts d’endurance en compréhension orale et permet de toucher des réseaux lexicaux très variés, tout comme des niveaux de langue variés.

Objectifs

  • Travailler la compréhension orale
  • Enrichir le lexique de la vie quotidienne
  • Stimuler l’imagination et la créativité via la production orale, écrite et audiovisuelle
  • Améliorer la prononciation, la diction et l’interprétation

Démarches

De nombreuses démarches sont possibles. Généralement,

  • un remue-méninges autour du titre qui permet de faire des hypothèses et de découvrir un certain lexique
  • une première écoute suivie d’une reconstitution collective de ce qui a été compris
  • une deuxième écoute au terme de laquelle on complète les données de la première écoute
  • une troisième écoute avec la feuille de transcription lacunaire

Voici 2 exemples d’épisodes et leurs transcriptions lacunaires :

Episode : « Tiffany » 

Transcription : Mere et fille « Tiffany »

Episode : « La sortie de classe »

Mere et fille La sortie de classe

  • Pour aller au-delà de la compréhension et passer à la production orale, il est possible de faire endosser aux apprenants les rôles des personnages pour travailler la diction, l’interprétation et la gestuelle. Un bon exercice a été de se détacher de la diction « lecture », en obligeant les étudiants à se lever, à marcher tout en jouant leur rôle. Les productions orales sont enregistrées sur un mur virtuel collaboratif Padlet afin de donner un destinataire réel à l’enregistrement, le groupe, et de pouvoir s’écouter les uns les autres.
  • La tâche finale sera dans un premier temps une production écrite par groupes de 2 ou 3 dans laquelle les apprenants devront inventer un nouvel épisode de « Mère et fille » à partir des titres qu’ils ont choisis. Chacun apporte son ordinateur ou sa tablette et l’écriture sera collaborative.

d7dc6ef1-0386-4dba-a29a-61a60bd55f4e

Ira-t-on jusqu’au tournage ? Je l’espère…

Enseigner les réseaux lexicaux avec les cartes mentales (Simplemind par exemple)

Au moment où nous préparons des fiches « bilan » pour enseigner le lexique, voici quelques pistes intéressantes pour mieux organiser en sous-catégories la présentation du lexique :

Quel est l’intérêt des arborescences et autres cartes mentales ?

Je vous invite à écouter une émission (5 minutes) de France İnfo avec Alain Lieury sur la mémoire dans laquelle il rappelle l’importance de la mémoire sémantique qui organise les connaissances et a besoin de les hiérarchiser.

Voici, pour compléter, un extrait de Mémoire et réussite scolaire, Alain Lieury, Dunod, 1997, p.27 :

« Principe de hiérarchie catégorielle

Qu’est-ce donc que le sens, si ce n’est le mot ? En s’inspirant d’expériences antérieures qui montrent que la mémorisation est grandement facilitée par l’organisation en catégories naturelles (animaux, plantes, etc.), Collins et Quillian ont suggéré que comprendre, c’est d’abord catégoriser [C’est moi qui souligne]. Comprendre ce qu’est un « canari », pour prendre leur célèbre exemple, c’est savoir que c’est un oiseau. Mais comprendre ce qu’est un oiseau, c’est savoir que c’est un animal, de sorte que le sens des mots ou, plus brièvement, les concepts seraient classés en mémoire sémantique de façon hiérarchique : les catégories étant emboîtées dans des catégories plus générales sous la forme d’un arbre à l’envers. Dans une telle arborescence, chaque noeud représente le concept d’où partent des branches. L’analogie de l’arbre de la connaissance est très ancienne puisque, déjà explicitée à la Renaissance (Lieury, 1993), elle est présente dans les récits bibliques. Cette conception est maintenant usuelle en informatique, où l’on parle d’arborescence. »

Les applications proposant de créer des cartes mentales sont-elle un simple gadget de plus ?

Les applications qui proposent de créer des cartes mentales ont  l’avantage

– de jouer avec les codes de couleurs pour différencier les catégories

– de pouvoir inclure des photos : voici un autre extrait de l’ouvrage d’Alain Lieury

« […] les images (dessins, images mentales) sont plus efficaces en mémoire que les mots, comme l’ont montré Paivio, Fraisse et Denis. L’une de nos expériences a effectué cette comparaison sur près de deux cents lycéens de diverses terminales. […] Les images sont très efficaces en mémoire. Alors que le rappel moyen est d’environ 7 pour les mots, il est d’environ 9 pour les dessins. La reconnaissance est également remarquable avec en général 90% pour les dessins contre 70 % pour les mots. » Op. cit. p.37.

– de pouvoir interagir avec la classe en ajoutant des mots en direct à son projet.

Un outil possible est l’application « Simplemind », très facile à utiliser sur l’Ipad

Attention toutefois au moment d’exporter votre projet avec la version gratuite…

Publié le 30 mai 2014 par geraldinelarguier sur Français et numérique 

Il est aussi possible de transformer la carte mentale en capsule pour inverser la classe : les apprenants peuvent ainsi écouter la prononciation du lexique et remplir la carte mentale lacunaire chez eux, ce qui permet de passer au réİnvestissement en classe.

Voici un exemple à partir de la carte mentale sur le lexique de la langue :

Lexique de la langue from Geraldine L on Vimeo.

Classe inversée, capsule et étymologies grecques et latines

Dans le cadre de la semaine de la Francophonie, la langue française est à l’honneur et c’est l’occasion pour nos 9emes de découvrir quelques étymologies utiles. Nous allons tester la classe inversée dans le cadre du cours de langue en revisitant le support pédagogique donné l’année dernière

– pour créer un horizon d’attente chez les élèves qui devraient arriver en sachant de quoi il va être question

– et pour pouvoir passer à l’action dès l’entrée en classe afin de supprimer le cours magistral que je faisais habituellement : on transfère en amont le concept d’étymologies et on garde le plaisir de la découverte et des hypothèses pour le présentiel.

On teste !

Origines langue française from Geraldine L on Vimeo.

Publié le 15 mars 2015 par geraldinelarguier sur Français et numérique 

Capsule pour aider les apprenants à travailler le lexique en autonomie

Voici une capsule qui a comme objectif de proposer quelques stratégies aux apprenants (FLE) pour apprendre en autonomie le lexique : des gestes simples comme

choisir une couleur réservée au lexique pour distinguer le lexique déjà connu des nouveaux mots,

surligner le nouveau lexique sur tous les supports d’apprentissage (compréhensions orales, écrites, documents déclencheurs, etc.)

classer et faire des sous-catégories en rassemblant les mots ayant des points communs

apprendre toutes les composantes du mot : son orthographe, sa prononciation, son genre, sa structure, ses différents sens, son étymologie, sa composition, etc.

– faire les exercices et surtout s’efforcer de réinvestir ce lexique dans les productions écrites ou orales, quitte à garder sous les yeux une feuille rassemblant ce lexique.

GL