Les élections présidentielles approchent : voici quelques ressources pour faire découvrir les candidat.es et leurs propositions à vos apprenant.es (à partir du niveau B1).
Un site pour se positionner face aux 12 candidats et candidates
La boussole présidentielle est un site créé par SciencesPo : après avoir répondu à quelques questions (sexe, année de naissance, études), il faut se positionner par rapport à 26 affirmations telles que « Il faut taxer plus fortement les droits de succession » en choisissant parmi 5 réponses :
Viennent ensuite 3 questions portant sur les 12 candidats. A la fin de ce questionnaire, le site vous situe selon votre proximité avec les différents candidats et candidates. Vous pouvez choisir une position qui sera la synthèse de vos réponses.
Vous pouvez aussi choisir de vous situer thème par thème, comme dans l’exemple ci-dessous.
J’ai fait cet exercice avec mes apprenant.es qui avaient chacun.e leur smartphone tandis que je projetais sur grand écran les questions. Nous avons travaillé au même rythme afin que je puisse expliquer le lexique en temps réel et certains concepts parfois complexes.
Même si l’activité est un peu longue (35 minutes avec les explications) et exigeante, le bilan a été très positif car il permet d’enrichir de lexique, de mieux comprendre les enjeux de cette élection et les préoccupations des Français et des Françaises, mais surtout d’ouvrir sur des comparaisons interculturelles.
Le résultat reste individuel puisqu’il apparaît sur le smartphone de chaque personne.
L’application ELIZE
Il s’agit d’une application à télécharger sur son smartphone, ce qui est donc plus contraignant que le site créé par SciencesPo et moins sûr au niveau de la protection des données. Au fur et à mesure que l’on répond aux questions, le profil du candidat dont on se rapproche le plus se dessine.
Des vidéos pour comparer les propositions des candidats et candidates
Parmi les nombreuses vidéos sur ce thème, se détachent celles de Konbini en accès libre sur Youtube. Chacune dure environ 8 minutes, avec un rythme dynamique et aborde un thème précis, qui touche particulièrement les jeunes (légalisation du cannabis, précarité des jeunes, éducation, etc.) Chaque candidat ou candidate répond de manière concise à une question (avez-vous déjà fumé des cannabis ? Êtes-vous pour la légalisation du cannabis ?) en argumentant (ou pas).
Il est possible d’exploiter ces vidéos en distribuant un candidat ou une candidate à un binôme d’apprenant.es qui sera chargé de noter la position et les arguments proposés par la personne qu’ils représentent.
Voici par ailleurs une compréhension orale (B2) dont les objectifs sont de travailler l’argumentation et de découvrir les idées des candidat.es.
Dans cette situation de crise qui nous contraint à faire des cours à distance, l’impression d’anonymat domine souvent, laissant émerger un sentiment de frustration face à la dimension impersonnelle de ce nouveau type de relation. Comment insuffler une petite touche personnelle aux documents et fichiers que nous envoyons à nos apprenant.es ? Comment redonner un peu de personnalisation à nos cours ? Certes, les visioconférences, les échanges sur le réseau social choisi par le groupe permettent d’échanger, de retrouver un peu l’humour, les blagues, les manies de chacun et de chacune auxquels nous étions habitués en présentiel. Toutefois cette coloration personnelle s’estompe sous l’anonymat des fichiers, des documents scannés, des exercices corrigés en pdf, etc. Comment personnaliser nos cours, et plus particulièrement pour les cours de langues, comment conserver la continuité vocale, voire visuelle avec nos apprenant.es ? L’enregistreur d’écran, s’il n’est pas un miracle, peut compléter nos stratégies et redonner un saupoudrage de dimension personnelle aux activités proposées. Dans le modèle SAMR de Puentedura, il ne s’agit pas vraiment de « transformation » de la tâche : on reste dans l’ « augmentation », dans l’amélioration fonctionnelle, qui n’en reste pas moins intéressante dans le sens où elle teinte d’une couleur plus personnelle les documents que l’on envoie. A condition que l’on crée soi-même ses vidéos pour ses apprenant.es … D’où une envie de partager avec vous des outils faciles d’utilisation qui vous permettront de créer sur mesure des vidéos adaptées aux besoins de vos groupes.
Quel enregistreur d’écran choisir ?
Un enregistreur d’écran permet d’ajouter de la voix, de commenter, d’expliquer un document, un diaporama, une iconographie, une production écrite, etc. que vous avez sur votre ordinateur : il est ainsi possible de créer facilement des vidéos personnalisées et de les partager avec nos apprenant.es sous forme de lien pour stimuler le travail à distance en autonomie. Il existe de nombreux enregistreurs d’écran gratuits. Un des plus faciles à utiliser me semble être ScreencasOmatic, dont les fonctionnalités proposées dans la version gratuites sont largement suffisantes. Voici un tutoriel pour se lancer dans la création de vidéos avec cet outil : j’y explique aussi comment corriger l’enregistrement audio.
Tutoriel pour créer des vidéos avec ScreencastOmatic
Il existe bien d’autres outils pour faire des vidéos : en voici un autre, très intéressant, dans le sens où il permet de créer des vidéos rapides qui n’exigent pas un montage complexe, idéal pour des capsules « flash ». Il s’agit de LOOM, que l’on ne peut utiliser qu’avec le navigateur Google Chrome et qui se présente comme une extension que vous aurez en permanence sur votre navigateur. Voici un petit tutoriel pour l’installer.
Tutoriel pour installer l’extension Loom sur le navigateur Google Chrome
Un tout nouvel enregistreur d’écran Panopto permet d’enregistrer son écran de manière encore plus simple, sans avoir à télécharger de logiciel, ni même à créer de compte. Toutefois, les fonctionnalités sont très limitées et l’on ne peut enregistrer l’écran que d’un seul tenant, sans avoir la possibilité de faire une pause, ni de corriger par conséquent un morceau de l’enregistrement.
En quoi un enregistreur d’écran peut-il enrichir les cours de langues à distance ?
Varier les consignes écrites : donner des consignes sous forme de vidéos
Il est tout d’abord possible de donner des consignes, d’annoncer le programme des cours ou d’un cours, non pas sous forme de mails comme on le fait souvent mais sous forme de vidéos, l’idée étant de ne pas passer trop de temps à préparer sa vidéo. Pour les apprenant.es, c’est une compréhension orale supplémentaire qu’il est possible d’écouter plusieurs fois si la consigne n’est pas comprise. De plus, le fait de voir et d’entendre son enseignant.e octroie une touche bien plus humaine et personnalisée au message transmis qu’un mail. Voici un exemple destiné à mon groupe de « Débutants » : la vidéo est faite avec ScreencastOmatic et a été créée très rapidement puisqu’il y a un plan statique, sans changement de fond d’écran.
Accompagner la prononciation à distance L’enregistreur d’écran permet aussi de proposer une aide pour prononcer correctement des mots, des phrases. Il suffit de partir d’un document écrit, d’une infographie ou d’une iconographie présentant une thématique, par exemple « les fruits » (A1) proposé ci-dessous, puis d’y ajouter non seulement sa voix, mais aussi des mises en garde, des conseils, des écueils à éviter : faire attention aux liaisons avec l’article, aux pièges de la graphie, insister sur les difficultés rencontrées particulièrement par son public, etc. Les avantages de telles vidéos sont encore fort appréciés des étudiant.es qui peuvent s’entraîner à prononcer loin du regard et de l’oreille du groupe, (chacun.e, surtout les plus timides, protégeant ainsi sa « face ») et qui reconnaissent la voix de l’enseignant.e. : il s’agit d’un document fait sur mesure, à leur attention, avec l’intonation habituelle qu’ils entendent en classe. Une manière de prolonger virtuellement le contact et le lien. Voici un exemple qui mélange apprentissage du lexique et prononciation sur les fruits, fait avec LOOM.
Il est aussi possible d’enrichir le lexique à distance en complétant un réseau lexical qui a commencé à être étudié en cours : la capsule vient structurer le groupe de nouveaux mots et en ajoute d’autres dans un second temps.
Exemple de capsule faite avec Loom pour synthétiser le lexique du tourisme et l’enrichir (B2)
Corriger des productions écrites
Face à la difficulté de corriger les productions écrites qui arrivent dans notre boîte mail sous tous les formats possibles, il est possible de trouver une autre fonctionnalité aux enregistreurs d’écran : corriger une copie en la commentant avec sa voix, en ajoutant des explications qui seraient trop longues à écrire, et pourquoi pas, si l’étudiant.e est d’accord pour partager sa production écrite avec les autres, transformer une correction en modèle à suivre ou pas pour apprendre à respecter une méthodologie. Voici un exemple de correction faite sous forme de vidéo avec ScreencastOmatic : à partir de la lettre écrite par une étudiante (vers A2), j’ai fait une vidéo qui commente les points forts et les points faibles de la production et qui rappelle aussi la méthodologie pour écrire un mail/ une lettre tout en insistant sur les problèmes de langue importants.
Exemple de production écrite corrigée sous forme de vidéo avec ScreencastOmatic
Corriger un exercice structural Plutôt que de donner un corrigé écrit qui n’inclut pas nécessairement les explications, on peut de temps en temps créer une vidéo dans laquelle on explique et justifie les bonnes réponses de manière à accompagner à distance la correction de l’exercice et à lui donner plus de « chair » dans les explications, comme dans l’exemple ci-dessous. Il s’agit de la correction d’un exercice structural sur le discours indirect au passé, fait avec LOOM.
Faire une capsule sur un point de langue C’est le principe de la classe inversée de niveau 1 (Marcel Lebrun) : le cours de langue est donné sous forme de capsule et envoyé par mail aux apprenant.es qui la regardent une ou plusieurs fois, en faisant des pauses si nécessaire et en complétant une feuille de route de manière à qu’une trace écrite demeure. Ensuite, en présentiel, ou en visioconférence si le présentiel n’est pas possible, on met en commun les questions, on demande aux étudiant.es de donner des exemples pour commencer à réinvestir le point de langue abordé. Dans ces cas-là, les fonctionnalités de Loom sont un peu simples et il vaudrait mieux privilégier ScreencastOmatic. Voici un exemple proposé par l’une de mes étudiantes de M2 FLE, Léa Ithurria, qui a créé une capsule sur les partitifs avec ScreencastOmatic et la propose en libre accès sur le site Le TrèFLE fait des capsules.
Exemple de capsule faite avec ScreencastOmatic par Léa Ithurria
Faire faire des vidéos à ses apprenant.es avec un enregistreur d’écran
Pour boucler la boucle, il est intéressant de faire faire des vidéos, des exposés, des présentations par nos étudiant.es, comme dans l’exemple ci-dessus de manière à ce qu’à leur tour, ils puissent partager avec d’autres leur production. Tout dépend bien sûr des étudiant.es et de leurs capabilités numériques.
Il est clair que l’outil en soi ne transforme rien : tout repose sur la scénarisation du cours et sur l’intégration judicieuse de la capsule que vous aurez créée dans l’économie de la séquence. De plus, il est également fondamental de faire varier les supports d’activités, d’alterner envoi de fichiers, de capsules, de quiz en ligne, de productions écrites collaboratives afin de conserver à distance la diversité d’activités que nous avions en classe. Enfin, si l’on veut créer cette continuité vocale avec ses apprenant.es, il est fondamental de créer ses propres enregistrements d’écran. Ces pistes sont bien sûr à compléter avec les idées que vous voudrez bien partager !
Voici un projet mis en place avec mes étudiant.e.s autour du thème de la nourriture et qui peut se décliner quel que soit l’endroit où l’on enseigne le français. Dans un milieu homoglotte, comme le rappelle Chantal Parpette « la proximité immédiate du milieu cible autorise certaines modalités de travail qui contribuent à élargir l’espace d’apprentissage » : les apprenant.e.s ont pu non seulement tester les restaurants mais surtout interagir avec les serveurs, serveuses ou les chefs qui se sont presque tous pris au jeu et ont répondu avec patience aux questions de ces étrangers et étrangères vivement intéressés par la cuisine française. Dans un milieu alloglotte, on peut imaginer que l’enquête se fera en langue source mais que la production finale sera en français et, diffusée sur internet, elle sera destinée notamment aux touristes francophones.
Le but du projet était de créer une courte vidéo présentant un restaurant local dans lequel il est possible de manger pas cher et équilibré, c’est-à-dire de trouver des produits frais et une alimentation saine, pour moins de 10 euros.
Les objectifs linguistiques et grammaticaux étaient d’exprimer la conséquence et d’enrichir le lexique de la gastronomie.
Etape 1 : présentation du projet à distance sous forme de capsule en classe inversée afin de redonner la parole aux apprenant.e.s en cours. Lors du retour en présentiel, ils expliquent ce qu’ils doivent faire, posent des questions et forment des équipes si ce n’est déjà fait. Dès le départ, il a été annoncé que les productions seraient publiées sur notre page Facebook pour les partager avec les personnes qui nous suivent.
Etape 2 : Travail en classe sur la conséquence, le lexique, …
Etape 3 : Va-et-vient entre un travail à distance (recherche d’un restaurant, tests, photos, interviews, …) et de mini-bilans en classe pour savoir ce qui a été choisi, quelles difficultés ont été rencontrées avec les restaurateurs ou sur le plan technique.
Etape 4 : Présentation des productions en cours puis publications sur un réseau social afin de créer des interactions avec de vrais internautes.
le réinvestissement de la conséquence a été plus ou moins suivi selon les groupes dont certains, enthousiasmés par le projet, ont oublié de réinvestir le point de grammaire ou ne l’ont fait qu’à l’écrit.
le fait d’aller au restaurant en groupe a soudé les étudiant.e.s qui se sont vus en dehors de l’université à la fois pour tester le restaurant mais aussi pour faire le montage et enregistrer leur voix.
le contact avec des natifs a été apprécié par tous car, même si nous sommes dans un milieu homoglotte, les interactions avec les natifs ne sont pas si évidentes.
le partage sur le réseau social (page Facebook du centre de langue) a été une source de fierté car grâce aux interactions avec des internautes, leur travail a pris un sens bien plus authentique que s’il n’avait été destiné qu’à la seule enseignante. Comme l’écrivent Ch. Olliver et L. Puren : “Proposer à un apprenant de publier les résultats de ses recherches sur un site très fréquenté, c’est le mettre dans une nouvelle posture. Il n’est plus seulement un apprenant, il est une personne disposant d’un savoir qu’il peut partager. Cela incite à plus de rigueur dans la construction du savoir, mais aussi dans la formulation de celle-ci et la qualité de la langue utilisée, les apprenants sont en effet conscients qu’ils vont être lus par des internautes qui auront des exigences vis-à-vis de leurs contributions.”
Parpette, C. (2006) « L’influence d’un environnement homoglotte sur l’enseignement du FLE : d’une réalité diffuse à une méthodologie constituée », PUG.
Ollivier, O et Puren, L Le web 2.0 en classe de langue, Maison des langues, Paris, 2011.
Voici un retour d’expérience de mon cours « Apprendre le français avec les séries TV ». Grâce à mon stagiaire de M1 de Fle, Quentin, j’ai découvert la série « Bloqués », diffusée initialement sur Canal+ qui met en scène deux jeunes avachis sur un canapé qui ne font rien et parlent de leur vie, en rêvant à une vie meilleure.
Les épisodes se caractérisent sur le plan linguistique par un langage familier, de nombreux mots en verlan et sur le plan culturel, par des références assez difficiles à comprendre sur l’actualité (sportifs, chanteurs, mais aussi « Gros Quick », etc.). C’est pourtant, malgré cette difficulté, une excellente source pour approfondir l’enrichissement du registre familier des apprenants, pour les sensibiliser au verlan hyper-actuel et leur permettre de comprendre quelques conversations de la vie réelle…
Capture d’écran de la série « Bloqués »
En outre, le format, très court de moins de 2 minutes, l’austérité du décor (un huis clos dans un appartement désordonné, un canapé) et le nombre réduit d’acteurs (deux) sont autant d’éléments qui permettent d’envisager une parodie avec des apprenants.
Un autre grand intérêt des épisodes de cette série repose sur le fait que les dialogues sont souvent constitués de répliques données en alternance et proposant des définitions personnelles d’un concept, d’une idée. Par exemple, « L’enfer, c’est … », « La vie serait plus cool si … ». La structure anaphorique permet de donner un cadre aux apprenants lors de la compréhension mais aussi au moment de la production écrite.
Objectifs :
enrichir le « parler jeune » des apprenants : lexique, syntaxe, prononciation
travailler sur les différents niveaux de langue
être capable de produire un texte en « parler jeune » avec un contexte adéquat
parodier la série TV » Bloqués » et produire un épisode en groupes.
Déroulement de la séquence :
visionnage de plusieurs épisodes de « Bloqués » sans, puis avec une transcription lacunaire. Les apprenants ont fait un relevé du « parler jeune » (verlan, mots familiers, intonation, etc.)
mise en place d’une enquête : par groupe, les étudiants sont partis enquêter sur le terrain, à l’université ou dans leur environnement afin de récolter un certain nombre de mots ou d’expressions employés par les jeunes. Ils devaient accompagner chaque mot d’un exemple et définir le registre. Ils ont rempli un document collaboratif sur Google Drive pour mettre en commun tous ces mots et éviter les doublons.
analyse et réinvestissement du lexique récolté : nous avons expliqué les mots, trouvé des équivalents en langage courant, proposé d’autres exemples pour bien cerner le contexte dans lequel il est possible de réutiliser ces mots et pour en combiner deux ou trois.
présentation du projet d’écrire une parodie de « Bloqués »
productions écrites : les apprenants devaient choisir ou proposer un titre d’épisode (« l’enfer, c’est », « j’ai largué mon mec parce que… », « la vie serait plus cool si.. ») et écrire individuellement 4 ou 5 phrases donnant une proposition et contenant du lexique familier
tournage de nos épisodes : nous avons tourné en cours en une heure avec une tablette. Le seul apprenant qui a refusé d’être filmé s’est chargé de jouer le rôle du réalisateur. Il n’y a pas eu de répétitions par manque de temps mais aussi car l’idée n’était pas d’avoir des vidéos parfaites. L’objectif essentiel était de réinvestir ces mots dans une situation liée au plaisir d’apprendre. J’ai ensuite fait les montages avec Imovie.
publication de nos épisodes : dès le lancement du projet, il a été annoncé que les productions seraient publiées sur la page Facebook de notre institut, ce qui fonctionne désormais comme un levier pour la motivation et comme une habitude car toutes nos parodies ont été partagées auparavant. Cette phase est essentielle dans le sens où elle permet un partage de la production avec le réseau d’amis (même les non-francophones !) et où elle donne du sens à la parodie qui sera regardée par d’autres personnes que le groupe d’étudiants de la classe.
En conclusion, si l’on compare cette série aux autres séries travaillées précédemment (« Mère et fille », « Bref », « Parents mode d’emploi »), elle est plus difficile sur le plan de la compréhension car elle met en contact les apprenants avec un « parler jeune » auquel ils ne sont pas habitués et qu’ils ne découvrent que sporadiquement dans les cours de langue : avec cette série, la dose de « parler jeune » est à la limite du supportable pour certains. Il est donc fondamental de travailler en amont sur les stratégies à mettre en place pour la compréhension.
Elle est aussi plus difficile car elle met en contact les apprenants avec le lexique familier, et par conséquent avec, parfois, sinon des concepts plus vulgaires, du moins des sujets plus tabous, ce qui est toujours un exercice d’équilibriste pour l’enseignant avec certains apprenants dont la culture est très pudique. Il faut accepter de sortir de sa zone de confort.
Au terme de ce semestre, la série que mes apprenants placent en haut du podium est « Bref » : même si le débit est très très rapide, l’humour les a séduit, le fait que le personnage soit un anti-héros aussi. Elle est plus facile à comprendre car il y a moins d’allusions culturelles très actuelles que dans « Bloqués ». Mais, la force de cette dernière série est qu’elle a offert aux apprenants un rapport jubilatoire, un peu rabelaisien à une langue qu’ils ne connaissaient presque pas…
Comment rendre actifs les apprenants pendant un voyage scolaire ou universitaire ? Parmi les nombreuses pistes possibles, voici un retour d’expérience avec la cartographie interactive proposée par Google Maps, que j’affectionne particulièrement et que j’approfondis car elle offre de nombreux avantages en Fle, pour présenter les tâches finales.
Cet outil permet un travail collaboratif (chaque apprenant peut coller sa production dès lors qu’il a reçu le lien d’accès), le tracé d’un itinéraire qui rend visible le trajet effectué et surtout la mise en commun des productions des apprenants qu’elles soient sous forme de textes, de photos ou de vidéos.
En outre, la tâche finale peut être partagée, montrée, donc mise en valeur, ce qui crée une stimulation non négligeable lors de la production des mini-tâches des apprenants et surtout, elle perdure et se transforme en souvenir, élément inestimable pour des apprenants en immersion en France pour quelques mois.
Ce retour d’expérience concerne un groupe de 12 étudiants américains de niveaux hétérogènes (A2 à B2+) qui suivent des cours de littérature française (du Moyen Age au XVIIIe) avec moi pendant 45 heures et avec lesquels nous avons organisé un voyage de Pau à Bordeaux pendant deux jours : nous avons visité les châteaux de Montaigne, de Montesquieu (auteurs étudiés en cours), le Grand-Théâtre et avons assisté à une représentation de « L’Avare », lu en français facile.
Le projet de mettre en place une carte interactive avec de courtes vidéos faites en groupes a été lancée sous forme de capsule pour gagner du temps et travailler la compréhension orale en autonomie. L’annonce de la publication des productions finales sur le site Facebook de notre institut a été mentionnée immédiatement pour privilégier l’idée de partage avec les autres étudiants qui ne faisaient pas partie du voyage.
Sur place, la plupart des apprenants ont choisi de prendre des photos pour faire un montage, plutôt que des vidéos, sans la moindre consigne technique de ma part. Les tâches étaient bien réparties : certains prenaient des photos, d’autres des notes de ce que disaient les guides. Il a fallu parfois s’achalander sur Internet car, par exemple, il était interdit de photographier l’intérieur du château de Montesquieu. Pendant le séjour, il est clair que le fait de donner la responsabilité de rendre compte d’une visite à tour de rôle a permis de rendre actifs mes apprenants, sans pour autant les surcharger de travail, ni les priver du plaisir des visites.
Les vidéos (ex du Grand-Théâtre ou château de Montaigne) ont été collées directement sur la carte Google Maps, ou m’ont été envoyées sur ma messagerie électronique : j’ai ajouté l’itinéraire et quelques photos du groupe, car les apprenants ont été assez pudiques et ont choisi des présentations neutres, sans oser inclure de visages connus, sans doute pour donner un air plus sérieux à leur production. C’est donc moi qui ai opté pour l’insertion de quelques photos plus personnelles.
La seule limite rencontrée est venue de la part de deux étudiantes qui n’ont pas pu participer au voyage et qui ont fait un travail qu’elles ont présenté sous forme de « PowerPoint », impossible à insérer dans un repère sur la carte.
En conclusion, après avoir testé la cartographie interactive pour présenter des tâches sous forme de production écrite, pour géolocaliser l’écriture de contes, pour donner du sens à un point de grammaire, il me semble que la carte Google Maps donne vraiment du sens à la préparation d’un voyage de classe, tant par le fait qu’elle rend indirectement les apprenants actifs, que par le partage et le souvenir qu’elle favorise.
Certes, sa production demande un certain investissement, mais force est de constater que le fait de rassembler en un même lieu tous ces souvenirs les ranime et en prolonge le plaisir.